Anne Le Troter

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[...] Lauren: Anne Le Troter, tu es artiste sonore, une plasticienne. Une artiste qui joue précisément de la plasticité, de la malléabilité de la langue et en particulier de la parole. Tes outils de travail sont le microphone et l’enregistreur. Depuis plus de neuf ans, tu enregistres des paroles: la tienne autant que celles des autres. Par le montage audio, tu les manipules, les désarticules, les recomposes, pour nous les donner à entendre—altérées—dans des espaces d’expositions. Tu as évoqué dans un précédent entretien(1), que cet engouement a commencé le jour où ton école d’art a acheté un microphone enregistreur. Tu as alors commencé à enregistrer ta voix et à la monter, en coupant les silences entre les mots. Ces manipulations ont donné lieu en 2011 à une série d’improvisations dont une intitulée Fifi, Riri, Loulou. Par la suite, tu en es venue à déplacer ton microphone de ta bouche à celles des autres. Je pense notamment aux pièces Les mitoyennes et Liste à puces, composées toutes deux à partir et avec la voix d’enquêteur·rice·s téléphoniques d’un Call Center. Peux-tu nous expliquer ton choix de glisser de l’enregistrement d’une voix singulière (la tienne témoignant—d’après tes mots—d’une «pensée en train de se formuler») à l’enregistrement d’une voix générique (la leur, ordonnée et dirigée selon des protocoles d’enquêtes téléphoniques)? 


Anne: Le geste de l’avant-bras, qui part de ma bouche pour aller vers celles des autres, c’est aussi le geste pour se muscler le biceps et j’aime bien imaginer mon enregistreur comme un coach sportif ou comme une plateforme de rencontre: une sorte de Tinder de la parole. Mon enregistreur était et reste un objet intime auquel je ne cesse de parler. C’est ma façon d’envisager le monde, de chercher à le comprendre. C’est aussi ma façon d’écrire. J’écris en enregistrant des phrases, en les écoutant et finalement en les transcrivant. Depuis neuf ans, j’écris une sorte de monologue continu, une pensée toujours en train de se formuler, comme dans Firi, Riri, Loulou. Je colle mes lèvres sur le microphone de mon enregistreur, je l’embrasse. [...]

Extract from an exchange between Anne Le Troter and Lauren Tortil that took place between March and May of 2020, during the first lockdown in France, and then later during a meeting at the Bergerie Nationale de Rambouillet in December of 2020.

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For all the soundworks © Anne Le Troter